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Les évènements qui ont eu lieu à Shengal le 3 aout 2014 ont mis en danger l’existence des Yézidis. Abandonnés par les Peshmergas, et laissés à la merci des terroristes les plus sanguinaires du monde, les Yézidis ont perdu la foi en gouvernement kurde. Mais que s’est-il passé ce fameux 3 aout 2014 et était-il possible d’éviter la tragédie de Shengal ?

Le premier signal inquiétant pour les Yézidis a été la prise de Mossoul en juin 2014. Ayant une idéologie extrêmement violente, les djihadistes tuent tous ceux qui ne partageaient pas les mêmes croyances qu’eux. Un mauvais pressentiment avait saisi les Yézidis lorsque les djihadistes ont encerclé Shengal en capturant Baadge au Sud, Rabia au Nord et Tel-Affar à l’Est. Après avoir capturé ces villes, l’E.I. a annoncé la capture imminente de Shengal sur la chaine télévisé « Al-Rafaïdine ». Tous ces évènements ont eu lieu en juin, ce qui veut dire que les autorités kurdes étaient au courant des intentions des terroristes et avaient environ 50 jours pour contrecarrer les plans des djihadistes et empêcher le 74ème génocide des Yézidis d’avoir lieu. Et selon les normes militaires, le délai de 50 jours est un laps de temps assez long. Cependant aucune action concrète n’a été entreprise.

Dans une interview donnée à «The Daily Beast», l’un des membres du PDK à Shengal a déclaré : «Les dirigeants du parti nous ont dit de ne pas semer la panique et de faire tout notre possible pour que les habitants de Shengal ne quittent pas la région, autrement nos salaires seraient réduits. Pendant que l’Etat islamique progressait au Sud, au Nord les Peshmergas, les membres du PDK et les fonctionnaires du parti cachaient l’offensive des terroristes ».

Sarbast Bapir, le dirigeant du PDK à Shengal, avait l’habitude de poser fièrement arme à la main devant les journalistes et déclarait « qu’il se battrait jusqu’à la dernière goutte de son sang pour défendre Shengal » Néanmoins il était le premier qui a quitté la région quelques heures avant l’attaque des terroristes.

Selon Patrick Frank, le directeur du centre des recherches inter-religieuses se trouvant à Bamberg, au Kurdistan irakien, l’Etat islamique a beaucoup de soutient parmi la population loclae. Ainsi 700 jeunes Kurdes ont déjà rejoint l’Etat islamique. Le clergé musulman du KRG prêche des discours incitant la haine contre les Yézidis « infidèles ». Selon le chercheur allemand, les autorités kurdes ne laissent pas les Yézidis occuper les postes importants dans le gouvernement ou dans l’administration. Les 600 000 Yézidis du KRG sont représenté par un seul et unique député, « que l’on a, selon les faits connus, corrompu ». Le chercheur craint que les armés livrés par l’Allemagne au clan barzani, soient utilisés dans le futur contre les Yézidis et contre les autres minorités religieuses.
« Al Monitor », à son tour, note le rôle important des combattants du YPG dans le sauvetage des Yézidis. Selon le journal, bien que les officiels kurdes se plaignent de l’armement désuet des Peshmergas, le génocide des Yézidis aurait pu être évité. « Je le jure, si nous nous étions battus contre Daesh, ils n’auraient jamais pris le contrôle de cette région. Nous les aurions battus si nous avions résisté », a déclaré un des Peshmergas du PDK déployés dans Shengal.

Les vidéos de massacres des Yézidis et de leur fuite dans les montagnes de Shengal ont fait le tour du monde. Ces images sont d’ailleurs devenues un atout majeur pour Massoud Barzani, qui a fait appel à la communauté internationale, demandant une aide militaire. En effet, ce fut après le génocide des Yézidis que les pays occidentaux ont commencé à armer et entraîner l’armée kurde d’Irak. On ne peut donc pas parler de « retraite tactique », pour citer les partisans du PDK. Toute

retraite tactique implique l’évacuation de la population civile, or les Yézidis de Shengal ont clairement été délaissés à la merci des terroristes, ce profitant aux ambitions politiques d’Erbil, pour ne pas dire de M. Barzani. Ainsi ce n’est pas Kirkouk, mais Shengal qui a été abandonné. Et la raison de cela, selon le « Daily Beast », est que les Yézidis se disent avant tout Yézidis.

Aujourd’hui, certains Yézidis aisés, des membres du clergé et quelques intellectuels, tous nourris par le PDK, tentent par tous les moyens de blanchir M. Barzani, en dépit du sang versé et de l’honneur bafoué du peuple yézidi. Si l’élite d’un peuple est dépourvue de mémoire, c’est alors le peuple lui-même qui est voué à l’extinction.